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Par un communiqué des plus sibyllins (1), la centrale atomique EDF du Tricastin (Drôme-Vaucluse) a annoncé le 12 octobre dernier qu'une fuite de liquide de refroidissement dans l’environnement a eu lieu le 7 septembre 2022 suite à un "aléas technique". Comme c'est joliment dit. Une pudeur qui masque toutefois un incident réel. D'autre part le niveau de fluide rejeté est supérieur à 100 kg et en dépassement de la limite annuelle "autorisée" (par dérogation au code de l'environnement et de la santé) de rejets toxiques.

CN Tricastin état précis le 11 11 2022 : rejets vapeur réacteur n°1 enceinte confinement sortie échangeur(s) et  rejets vapeur salle machines réacteur n°3 en surchauffeLe nucléariste ne précise ni sur quel appareillage ou installation a eu lieu cette fuite (zone réacteur? salle des machines? générateur de vapeur? station?...) ni de quel type de fluide il s'agit, ni les circonstances ayant entraîné la fuite, ni si la fuite était en elle-même au-delà des limites de pollutions "autorisées" ou bien si le dépassement résulte du cumul d’autres incidents similaires survenus sur le site nucléaire du Tricastin au long de l’année 2022 (2, relevé des rejets chimiques du mois d'octobre 2022).

Pollution, fuite, gaz à effet de serre, équivalent CO2

La chaleur dans certaines parties des installations nucléaires et annexes est telle que l’air et les équipements nécessitent un refroidissement permanent par des fluides frigorigènes. Lorsque ces liquides de refroidissement s’échappent à l’air libre, ils deviennent des gaz à effet de serre dont les caractéristiques et impacts, notamment le pouvoir de réchauffement global (PRG), sont loin d'être anodins en fonction du type de fluide utilisé. Ainsi, 1 kg de fluide de type HFC-134a est équivalent à 3710 kg de CO2 au terme de 20 années (3). Ces fuites de liquide de refroidissement sont donc en fait des émissions de puissants gaz à effet de serre.

0_logo_pdf.pngSans omettre que chaque jour, chaque heure, nuit et jour, la centrale atomique EDF du Tricastin rejette des gaz et liquides radioactifs dans l'air et dans l'eau (pdf ci-contre et 6) comme en atteste ce relevé interne EDF du mois d'octobre 2022.

Comme l’incident n’aurait pas semble-t-il impliqué de rejet radioactif, EDF le présente comme n’ayant eu aucune conséquence sur l’environnement et l'aurait déclaré aux autorités comme incident significatif pour l’environnement (4) puisque la limite annuelle autorisée a été atteinte et dépassée, tout en le classant au niveau 0 sur l’échelle des incidents nucléaires INES (5).

Cette année  pas moins de 6 centrales nucléaires ont dépassé en France la limite annuelle "autorisée" de rejets toxiques : Tricastin (Drôme-Vaucluse), Bugey (Ain), Paluel (Seine-Maritime), Flamanville (Manche), Civaux (Vienne) et Belleville (Cher).

photo EHS-France

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(1) https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-du-tricastin/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-du-tricastin/evenements-significatifs-septembre-2022
(2) http://coordination-antinucleaire-sudest.net/2012/public/pdf/2022-10-30_Rejets-chimiques-Tricastin_oct-2022.pdf
(3) Bernard Laponche, octobre 2020, Global Chance "Certains gaz à effet de serre des centrales nucléaires"
(4) https://www.asn.fr/Lexique/E/Evenement-significatif
(5) INES : International nuclear and radiological event scale (Échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques) : https://www.asn.fr/Lexique/I/INES
(6) : https://www.edf.fr/sites/groupe/files/2022-11/Rejets%20radioactifs%20Tricastin%20oct%202022.pdf