Explosion d'un conteneur radioactif militaire à l'usine de Malvesi-Narbonne, trois blessés
Par Rédaction le mardi 25 septembre 2018, 13:11 - National - Lien permanent
Un accident nucléaire vient de se produire ce 19 septembre sur le site d'Areva-Orano à Malvési (Aude). Après avoir déployé un silence assourdissant, la direction de l'entreprise reconnaît qu'un fût de matière uranifère militaire situé au cœur d'un stock de 221 fûts entreposés-là depuis les années 1980, a explosé. Un autre incident s'était déjà produit quelques semaines plus tôt. La France rayonne, la population s'irradie !
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Un fût de matière uranifère recyclable (MUR) a explosé sur le site nucléaire narbonnais de Malvési (Aude) au sein d’un ensemble de 221 fûts de 200 litres chacun regroupés en dix entassements. Ces fûts de déchets radioactifs militaires sont stockés là depuis la fin des années 80. Ce n’est que dernièrement que Areva-Orano a reconnu ce stockage, avouant par là-même qu'on ne peut différencier le nucléaire civil du militaire et qu'Areva participe bien à la prolifération atomique.
Plus d’une semaine après l’accident qui s’est produit le 19 septembre en fin de matinée, le voile se lève peu à peu. C'est grâce à l’association de défense de l’environnement Éccla présente à une réunion de l’Observatoire des rejets avec des élus, des représentants de la préfecture et de la sous-préfecture et de la Direction Régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) que la vérité a percé le mur du silence entretenu depuis près de 40 ans par la nucléocratie et le pouvoir politique.
Areva-Orano, dont le site "Comurhex" de Malvési est la porte d'entrée du minerai d'uranium en France et traite entre 12.000 et 15.000 tonnes d'uranium naturel par an, a été contrainte aussi de reconnaître qu’un autre incident qualifié hypocritement de "mineur" s’était déjà produit quelques semaines plus tôt lors d'une opération d'inspection visant à déterminer le contenu de ces fûts et de ce qu'il pourrait être fait ensuite de ce stock mortel. 121 fûts resterait à examiner.
Un dégagement gazeux radioactif et l'explosion
Lors de l’ouverture d’un de ces terrifiants fûts un dégagement gazeux s’est produit suivit aussitôt par une explosion. Les analyses qui ont pu être effectuées depuis ont montré que de l’uranium métal, du niobium et des métaux lourds s'y trouvaient entassés. Les sapeurs-pompiers de l'Aude qui sont intervenus ont mis en place un périmètre de sécurité de 50 mètres alors que les deux salariés qui manipulaient les fûts et un pompier de sécurisation ont été atteints par l'explosion et blessés et évacués au centre hospitalier de Narbonne. Une enquête de l’inspection du travail est ouverte afin de vérifier les conditions de travail des salariés concernés.
La Direction de Areva-Orano affirme contre toute vraisemblance qu'il n'y aurait pas eu de contaminations ni intérieure ni extérieure. Mais la Préfecture, soucieuse de se couvrir, a suspendu les opérations, pris un arrêté de mesures d’urgence avec plusieurs prescriptions de mise en sécurité et de mesures immédiates et soumet la reprise de l’ouverture de ces fûts à une nouvelle autorisation, demandant qu'un nouveau protocole soit mis en place. Areva doit ainsi transmettre un rapport d’accident au Préfet et à l’inspection des installations classées dans un délai de huit jours. Il devra comporter les circonstances et la chronologie précise de l’événement,
l’analyse des causes et conséquences de l’accident, les effets sur la
personne et l’environnement, les mesures pour éviter tout risque
d’accident similaire et en particulier les protocoles d’échantillonnage
modifiés.
La Dreal qui a réalisé une inspection de l’environnement a demandé la révision de la procédure d’échantillonnage des fûts de MUR « compte tenu de leur composition variable et de leur ancienneté » sans en dire plus sur l’origine exacte de ces fûts ni sur leur composition ni sur leur provenance et leur âge. De son côté le Procureur de Narbonne à ouvert une instruction et confié à la gendarmerie une enquête de flagrance pour blessures involontaires et mise en danger de la vie d’autrui. Des scellés ont été posés sur le local du hangar 17BE où l’explosion s’est produite.
Rupture de digue, contaminations, stockages non-déclarés
"Loin d’être une petite usine chimique anodine, Areva Malvési est un discret colosse du nucléaire, qui n’a que quatre équivalents dans le monde, et dont le passé pose problème, comme s’en est aperçu l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) à la suite d’un accident survenu en 2004. A l’époque, après la rupture d’une digue, le contenu d’un bassin se répand alentour. Il s’agit de boues que l’usine présente comme « nitratées ». Mais en 2006, des prélèvements effectués à la sauvette par des riverains et analysés par la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (Criirad) montrent qu’elles sont aussi très radioactives." écrivait l'année dernière le quotidien Le Monde (1).
Bien pire encore car ces déchets boueux contiennent des éléments radioactifs qui n’auraient jamais dû se trouver là. Ainsi du plutonium, de l’américium et du technétium, autant d'éléments radioactifs qui n’existent pas à l’état naturel et dont la présence est donc d'origine humaine, industrielle et militaire. Impossible qu'ils soient présents dans les minerais d’uranium (yellow-cake) importés du Niger et transformés par l’usine en UF4 pour le nucléaire civil, l'armement et la bombe. Mais ils ont les retrouvent dans les produits de fission nucléaires (combustibles) usagé sortant des réacteurs atomiques. Qui sont normalement acheminés vers l'installation de La Hague dans la Manche pour y être conditionnés après un retraitement très partiel.
Les dirigeants d’Areva-Malvési ont été contraints d'admettre l’odieux : de 1960 à 1983, l'entreprise a tenté de recycler des combustibles nucléaires usagés pour essayer d'y récupérer quelques grammes d'uranium pouvant être ré-exploités. L'ancêtre du terrifiant Mox dont le réacteur n°3 qui a explosé à Fukushima-Daïchi est gorgé.
Ces manipulations nucléaires cachées, polluantes et contaminantes, n'étaient en plus pas légales car non-déclarées comme INB (installations nucléaires de Base) mais simplement comme ICPE (installation classée pour l'environnement). Site, bassins et environnement ont pris leurs doses et les analyses effectuées par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) en 2007 ont révélé la présence de plutonium dans le blé d’un champ voisin, des traces et présence d’uranium jusqu'à deux kilomètres du site en direction de Narbonne. Mais l’impact sur la santé et la vie est toujours actuellement dissimulé, d'autant qu'il n'existe pas dans la région de registre des cancers. Alors depuis des habitations se construisent alentour, à moins d'un kilomètre du site nucléaire de Malvési.
Ces découverte et révélation révèlent un scandale. Celui des arrangements en tous genres du monde nucléaire et de sa caste, de ses malversations, de l'arrogance et du sentiment de toute puissance, de la complicité des politiciens aussi. Et de la guerre menée contre les habitants, les salariés et l'environnement. Et toujours aucune informations à ce jour sur le site internet de l'Autorité de Sûreté Nucléaire.
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(1) https://www.lemonde.fr/energies/article/2017/11/06/areva-malvesi-la-porte-d-entree-du-nucleaire-en-france_5210985_1653054.html
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