Cruas : EDF et le directeur du site nucléaire condamnés pour avoir tenté d'écouler par négligence des déchets radioactifs dans une simple décharge
Par admin le lundi 12 février 2018, 10:40 - Ardeche - Lien permanent
6000 euros d'amende pour EDF et 3000 euros pour le directeur de la centrale atomique de Cruas-Meysse pour leur gestion laxiste récurrente des déchets radioactifs et notamment l'affaire du 6 novembre 2015 où des déchets nucléaires mortels avaient atterri dans une benne de déchets conventionnels prête à quitter le site en direction d'une simple décharge.
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EDF et le directeur de la centrale nucléaire de Cruas-Meysse (Ardèche) ont été condamnés ce vendredi par le tribunal de police de Privas à des amendes de plusieurs milliers d’euros pour leur gestion dilettante des déchets nucléaires. Les nucléocrates écopent de six amendes de 1 000 euros pour EDF et six amendes de 500 euros avec sursis pour le directeur.
Des déchets radioactifs dans une benne en partance pour la déchetterie publique
La plainte déposée (1) visait des manquements graves dans la gestion des déchets mortels, notamment la découverte le 6 novembre 2015 de déchets nucléaires dans une benne de déchets conventionnels qui s’apprêtait à quitter le site. C'est à l'occasion d'une mesure effectuée par des techniciens qu'est détectée de la radioactivité au deuxième portique de contrôle : des combinaisons papier, pantalons et des sur-bottes qui avaient été portées par des travailleurs intervenant en zone nucléaire contaminée et qui devaient absolument être séparés des déchets conventionnels pour éviter toute contamination s'étaient retrouvés, comme par magie, dans un circuit ordinaire d'ordure prenant la direction de la déchèterie. Comme pour les rejets radioactif dans l'air on mélange et on dilue ni vu ni connu.
Il faudra quatre jours pour retrouver les différents objets du délits et 10 jours de mutisme et de dissimulation avant que EDF ne déclare officiellement le problème à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Ironie sordide du sort la découverte est intervenue seulement quelques jours après une inspection de l’ASN portant précisément sur la gestion des déchets suite à un nombre invraisemblable de problèmes survenus les années précédentes… Et les mois suivant n'ont pas conduit EDF à plus de rigueur : en juillet 2016 une nouvelle inspection de l’ASN concluait à un laisser-aller invraisemblable sur le site atomique tels des containers destinés aux déchets radioactifs qui ne portaient pas d’étiquetage appropriés, un stockage désordonné de sacs de gravats contaminés sans mention permettant de les identifier et rangés à côté de gravats non contaminés… A la fin 2017, une autre inspection révélait encore que des sacs de déchets non identifiés ou non ligaturés risquait de disperser dans l'air des particules et éléments contaminés.
Des actions citoyennes indispensables
La centrale atomique de Cruas, comme bon nombre de ses consoeurs de terreur éparpillées sur tout le territoire français, est le théâtre de dysfonctionnements récurrents tels la non-maîtrise complète et régulière de la réaction atomique et le risque de fusion du coeur des réacteurs ou encore la faiblesse des capacités de refroidissement du réacteur en cas d’accident faisant courir ainsi un risque à tout la région.
Les tuyauteries des stations de pompage des réacteurs 1 et 4 sont si corrodées et si mal entretenues qu’elles ne résisteraient pas à un séisme voire à un simple choc violent, le réacteur n° 4 risque toujours de voir sa prise d’eau de refroidissement obstruée par les végétaux charriés par le Rhône, le réacteur n° 3, en particulier, cumule les dysfonctionnements où pendant un an, une pompe de son système de refroidissement à l’arrêt est restée hors service du fait d’une mauvaise réparation. Sans que personne ne s’en rende compte, pendant trois mois, de fin novembre 2017 à début janvier 2018, une fuite de tuyauterie de l’enceinte de confinement - censée être étanche - a générée des rejets non contrôlés dans l’environnement et a nécessité la mise à l’arrêt du réacteur pour réparation.
Cruas est aussi l'illustration de l'aberrant et dispendieux "grand carénage" visant à prolonger à tout prix le fonctionnement des installations nucléaires obsolètes et menaçantes.
Si selon la rhétorique habituelle et grotesque de la direction EDF, « cet événement n’a pas eu de conséquence sur les installations, sur l’environnement ou sur les travailleurs », l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) constatait dans son rapport daté du 1er décembre 2015 que « différentes barrières techniques et organisationnelles […] ont été défaillantes ».
Cette condamnation fait suite à l'intrusion en novembre 2017 de militants de Greenpeace dans cette centrale nucléaire afin d'alerter les autorités sur la vulnérabilité des piscines d'entreposage et de refroidissement des produits de fission atomique (combustibles) usagés. Une autre action de blocage de l'accès à la centrale nucléaire avait été menée précédemment en mai 2014 par la Coordination antinucléaire du sud-est.
Lorsque l'on sait que la centrale nucléaire de Cruas-Meysse génère 900 tonnes de déchets radioactifs par an et 11.300 tonnes de déchets conventionnels il y a de quoi frémir et se soulever.
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(1) Stop Nucléaire 26-07, FRAPNA Ardèche, France Nature Environnement, SDN Sud-Ardèche, SDN étaient parties civiles.
En plus de ce problème récurrent de gestion des déchets, la centrale de Cruas est le théâtre de dysfonctionnements lourds qui menacent les travailleurs et les riverains. Ainsi, en 2016, elle a été concernée par une série d’événements concernant la maîtrise de la réaction nucléaire, découlant de réglages inappropriés de paramètres des systèmes de pilotage et de protection du cœur du réacteur. Le 5 décembre 2017, l’ASN a dû prendre une décision pour enjoindre EDF de renforcer ses contrôles techniques et ses vérifications. Cette centrale présente également un risque important de « perte de la source froide » (c’est-à-dire de capacités de refroidissement du réacteur en cas d’accident) en raison de nombreuses défaillances techniques et organisationnelles. Ces exemples constituent autant d’illustrations de l’incapacité d’EDF à effectuer une maintenance correcte de ses installations et à contrôler la qualité des travaux. Ce ne sont pas les travailleurs qui doivent être mis en cause, mais bien les lignes directrices données par EDF qui, dans une course à la rentabilité absurde, cherche à raccourcir le temps dédié aux opérations de maintenance. Il faut sortir immédiatement du nucléaire.
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