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Pas facile d'obtenir d'une municipalité ou des élus, censés être les délégataires des citoyens, le texte d'accords passés avec des sociétés "sulfureuses". A Avignon, si les réunions du Conseil municipal sont publiques comme la loi l'y oblige, les accords et autres textes sur lesquels les élu-es se prononcent semblent relever d'un quasi "secret défense". A se demander si les élu-es qui votent ont bien eu en main et lu les projets.

Il aura donc fallu des semaines d'investigation et de contacts pour se procurer l'accord liant Areva et la ville d'Avignon et contre lequel les élus écologistes n'ont pas réagi, afin, d'après leur leader, de ne pas briser la majorité municipale PS-EELV.

Le 24 juillet 2014, la coordination antinucléaire du sud-est avait dénoncé, sur le principe, cet accord contre nature (voir notre article) et fustigé l'attitude des élu-es. Comment, une municipalité pouvait-elle accepter de recevoir de l'argent d'une entreprise de destruction atomique directement impliquée dans les rejets radioactifs mortels à deux pas de la ville ainsi que dans les atteintes à la santé et à la vie des enfants de Fukushima et sa région où la centrale nucléaire explosée et en perdition était alimentée en partie par le terrifiant "combustible" Mox produit par Areva (b) et dont le coeur du réacteur 3 est toujours en fusion.

Était dénoncé aussi l'attitude des élus EELV en charge de l'environnement et de la culture qui ne s'étaient pas opposés à ce don nucléariste alloué sous couvert d'une action en direction de la jeunesse initiée par le musée municipal.

Un accord et un don sur le dos des avignonnais et au grand bénéfice du lobby nucléaire

En contre-partie de 46000 malheureux euros (0,02% du budget de la ville d'Avignon qui avoisine les 225 millions d'€) Areva s'offre une virginité et, grâce aux élus, se dédouane de ses agissements nocifs tout en redorant son sinistre blason, n'hésitant pas à préciser que ses " ... axes de mécénat sont (tenez-vous bien) l'éducation, la santé et la culture" et vise à favoriser " l'accès à la culture des publics défavorisés en France et dans les régions où le groupe est implanté". Qu'en pensent les enfants du Niger où l'atomiste exploite des mines d'uranium qui contaminent leur lieux de vie et leur santé et qu'en pensent les enfants de Fukushima qui pissent de la radioactivité dans leurs urines ?

Dans cet accord de près de 10 pages, signé par la mairesse socialiste avec la « Fondation Areva », on découvre que la Ville d'Avignon s'engage à faire la promo d'Areva, s'interdit d'agir contre les intérêts d'Areva, privatise des espaces publics au profit d'Areva, donne à Areva le droit mondial d'utiliser la Ville d'Avignon dans sa communication, met à disposition d'Areva du personnel communal . Tout en faisant bénéficier Areva d'une déduction fiscale et d'un non-assujettissement à la TVA.

On comprend donc mieux pourquoi Areva s'est jeté furieusement sur notre article dénonçant cet accord en portant plainte en diffamation contre nous.

Voici comment le lobby nucléaire pénètre les institutions et embobine les élu-es à son plus grand profit. La campagne de pub la plus rentable de l'Histoire (quoique talonnée par la promo gouvernementale effrénée des voitures nucléaires dites "électriques").

Comment Areva fait échapper à l'impôt et à la TVA une partie de ses bénéfices

C'est légalement par le tour de passe-passe d'une « Fondation d'entreprise » a visée d’intérêt général créée en 2007 pour 5 ans et prolongée à ce jour jusqu'en 2017 qu'Areva distrait une part de son chiffre d'affaire de l'impôt et de la TVA tout en se redorant le blason. Pour la période 2012-2017 il s'agit de 7 500 000 € (1).

La « fondation » qui est une organisation (personne morale) type « loi 1901 » n'a, en fait, aucun membre et est dirigée par un conseil d'administration composé de 6 personnes désignées, et présidée par le Président du Directoire du groupe nucléaire Areva. D'aucun pourrait dire qu'il s'agit en fait d'une structure-écran du groupe nucléaire qui répartit sa manne financière auprès d'associations et collectivités sélectionnées en fonction d'une stratégie de propagande.

C'est le nom d'un certain Mr Arnaud de Bourayne, pour le compte d'Areva, qui officialise le contrat avec Avignon. Or ce vice-président de la "fondation" n'est autre que l'ancien patron d'Areva pour la Chine, Directeur du Développement des Cadres Dirigeants Areva promu sous l'ère Lauvergeon, responsable pour un temps de l’exploitation minière en Amérique du Nord (destruction des territoires amérindiens), ancien président (2) d’Eurodif-Tricastin - signalé par l'ASN comme un site à haut danger (3)- et décrit dans la presse comme une « éminence grise de l'entourage de Luc Oursel  (aujourd'hui décédé) » voir comme un «commissaire politique »  ( http://lexpansion.lexpress.fr/entreprises/areva-decouvre-la-rigueur_1326248.html )

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Avignon à la botte de la pub d'Areva
Au détour de cet accord on perçoit clairement l'objectif d'Areva : utiliser son « mécénat » à des fins de promotion du groupe nucléaire. Avec injonction faite à la ville d'Avignon de lui transmettre toutes les informations nécessaires à sa stratégie de communication et de faire aussi la promo d'Areva sur les supports d'informations municipaux. Ainsi les avignonais auront du mal a échapper au nom d'Areva sur les panneaux publics, sur le magazine du musée et aussi sur le journal d'infos municipales. Et même, on est jamais trop prudent, sur des supports d'infos... pas encore existants.

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Avignon s'interdit de critiquer Areva et accepte son contrôle sur la communication municipale
La formulation signée à l'article 6.1 de la convention est suffisamment vague et indéterminée pour recouvrir une auto-censure de la ville d'Avignon de crainte de déplaire au donneur d'argent. Ainsi pas un mot de critique ou de contestation n'est autorisé tant pour ce qui concerne la « Fondation » que pour le groupe nucléaire lui-même. Et tant pis si les rejets radioactifs des installations nucléaires d'Areva continuent de contaminer la région. Que pensent les élus de cet encadrement directif de la liberté d'expression un mois après les assassinats des journalistes de Charlie-Hebdo ?
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Avignon abandonne son nom au bon vouloir d'Areva
Les élu-es livrent avec l'article 6.1.2 la renommée de la ville et de ses habitants au bon vouloir d'Areva qui peut utiliser à sa guise l'appellation avignonnaise et celle de son musée municipal Calvet (a).
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et comme Areva est gourmande, la municipalité aux petits oignons lui octroie une autorisation mondiale gratuite d'utilisation du label « musée Calvet de la ville d'Avignon » y compris sur le site internet du leader mondial de la production de produits radioactifs mortels.
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Et comme cela ne suffit pas encore, Areva interviendra sur le site internet du musée Calvet pour se présenter et rediriger directement vers le propre site internet de l'entreprise nucléaire. On imagine mal la ville d'Avignon critiquer ce que le géant de la destruction atomique mettra en ligne. D'autant que l'article 6.1 précité pourrait lui valoir quelques mesures de rétorsion.
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Mainmise sur le droit à l'image des visiteurs du musée
Tant pour sa communication interne que pour ses actions de promotion publiques sur ses stands de foires et d'expos Areva pourra utiliser les images des enfants et adultes venus voir ou participer à l'activité municipale sponsorisée par Areva. Cela, finalement, ne fait que concerner près de 300 enfants des écoles primaires et leurs familles, les animateurs et le personnel communal mis à disposition (voir ci-après), dont le droit à l'image est bradé par la collectivité locale à une entreprise privée.
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Les espaces publics privatisés et le personnel communal mis à disposition
Areva obtient la privatisation d'espaces publics avignonnais y compris pour des séminaires, conférences et événements de relations publiques . Mis à la disposition du roi des produits radioactifs au sein du musée Calvet: la Galerie Vernet, la cour d'honneur, le jardin et quelques salles de ci de-là. Et pour faire bonne mesure, la municipalité priera les personnels de police et sécurité de se mettre à disposition d'Areva pour ses petites sauteries. 900€ la soirée ? Pour combien de personnes et combien de temps ? Manquerait plus que les entreprises de gardiennages privées crient à la concurrence déloyale...
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Ce petit don d'Areva a-t-il été accepté par la municipalité et les élu-es en toute connaissance de cause ? On peine à le croire tant le grand bénéficiaire en est Areva et nullement les 300 enfants qui, de toute façon, auraient participé, sous une forme ou sous une autre, aux ateliers du musée municipal. Sauf que là, les enfants de la Zone d'Education Prioritaire avignonnaise se verront imposer en plus en permanence sous leurs yeux le nom « Areva » avec comme illustration ... un bel arbre multicolore. Et leurs visages pourront être exploités par le géant de la destruction atomique.

Ce green-washing lourdaud d'une entreprise polluante et dévastatrice de l'environnement et de la santé a-t-il pu échapper réellement à la sagacité des élu-es et à pas moins de 2 commissions municipales :celle de Culture-Tourisme-Développement numérique et celle de Finances-Domaine public-Administration générale installées du temps de l'ancienne municipalité UMP et reprises depuis par l'actuelle municipalité PS avec chacune près de 10 élu-es? Ou bien est-ce en toute connaissance de cause que les élus de tous bords ont fait acte d'allégeance ?

Cette convention a été présentée au Conseil municipal par l'adjointe-déléguée de la maire socialiste en charge de la Culture, du développement numérique et de la culture provençale qui est, par ailleurs, Présidente du « Cercle des Entrepreneurs » (4) et qui vient de baisser les subventions aux théâtres d'Avignon (5). Dans cette commission municipale siège des élus de toutes tendances y compris écologistes (6). Tout comme dans celle présidée par le 1er adjoint socialiste qui a approuvé sans sourciller, elle aussi, la convention avec le fabricant et fournisseur non seulement des produits mortels des réacteurs nucléaires mais aussi de l'uranium des armements militaires répandant la mort aux quatre coins de la planète.

Areva redore donc son blason à moindre frais avec l'aval de la municipalité. Sur le dos des avignonnais et des enfants. Est-ce bien moral et éthique ? Cet acte d'allégeance des élu-es est-il tolérable ? Cet acte de pénétration des lobby dans l'éducation et la vie de la cité est-il acceptable ?

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(a) http://www.musee-calvet-avignon.com
(b) L'exploitant japonais TEPCO a utilisé, à partir de février 2011, du combustible MOX dans le 3e réacteur de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. Au moment de la catastrophe nucléaire de Fukushima, deux réacteurs utilisaient du MOX au Japon. En juin 2014, un convoi de MOX parti de France mi-avril est arrivé au port japonais de la Centrale nucléaire de Takahama. ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Combustible_MOX ) et http://fr.wikipedia.org/wiki/Centrale_nucl%C3%A9aire_de_Fukushima_Daiichi
(1) http://www.areva.com/news/liblocal/docs/CP_groupe/2012/Fondation_DP_06-12_VF.pdf
(2) http://www.areva.com/FR/actualites-8327/nominations-au-sein-du-groupe-areva.html
(3) http://www.leblogfinance.com/2013/07/areva-mise-en-demeure-par-lasn-pour-les-sites-du-tricastin-et-de-romans.html
(4) http://www.cecilehelle.info/avignon-2014/equipe/catherine-bugeon/66
(5) http://www.ledauphine.com/vaucluse/2014/12/08/le-moral-est-en-berne-pour-les-acteurs-culturels-avignonnais
(6) http://www.avignon.fr/fr/instit/elus/com.php